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Ah ! Ah ! Chanson officielle du carnaval de Nice 1929 Paroles niçoises Jules Eynaudi, dit Juli Eynaudi, musique Hyacinthe Tarelli. Traditionnel comté de Nice.
Les paroles françaises d’origine, versifiées par Charles de Richter, ne sont pas reproduites ici. Le texte en français correspond à la traduction mot à mot de la version niçoise.
Le thème pour cette année 1929 est « Le dragon des Hespérides (1) ».

Première page de la partition sur feuilles volantes de Ah ! Ah !, illustration par Gustav Adolf Mossa, éd. Delrieu frères, 1929. | | 1er couplet |
Es per lou trèn blu qu’arriva Carneval que tèn lou couor jouious, countent ; Rei metent su nouostri riva Lou bouonur d’aimà e l’eternel printèms ! Autour d’èu cadun s’abriva, Pourtant à toui gai pantai dei premiè tems : L’ardour, l’amour, Couor vincitour, La tendra cansoun dei amourous Urous ! | | C’est par le train bleu (2) qu’arrive Carnaval qui rend les cœurs joyeux, contents ; Roi mettant sur nos rives Le bonheur d’aimer et l’éternel printemps ! Autour de lui chacun se précipite, Portant à tous le gai rêve des premiers temps : L’ardeur, l’amour, Cœur vainqueur, La tendre chanson des amoureux Heureux ! |
Refrain |
Ah ! Ah ! Lou vaquì ! Es en pèr aquì... Non ! Non ! Es aià ! Lou veès spountà ! Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! E jà cadun crès Veire lou « balès » Ma es aquì ! Couquin d’un chaudèu ! Es èu ! Ah ! Ah ! Lou vaquì, Es en pèr aquì... Non ! Non ! Lou vaquì, Es en pèr aquì... Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Courres, ficanas ! M’èu sabateas... Ensinda l’aurès, L’embrasserès... Ah ! Ah ! | | Ah ! Ah ! Le voici ! Il est par ici... Non ! Non ! Il est là-bas ! Vous le voyez pointer ! Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Et déjà chacun croit Voir le balèze Mais il est ici ! Coquin d’un échaudé ! C’est lui ! Ah ! Ah ! Le voici, Il est par ici... Non ! Non ! Le voici, Il est là-bas... Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Courez, curieux ! Avec lui, savatez (3)... Ainsi vous l’aurez, Vous l’embrasserez... Ah ! Ah ! |
2e couplet |
En gran gotou jà petia Lou vin de Bellet, tant car ai bouoi Nissart. Vieil garçoun e belli fiha Vénon s’amourà, voulent cadun sa part... Aquel elixir scintia Mihou que Jouvença e mai à l’escart Lou degustas, V’esperlecas, De lou tastà noun serès mai las ! L’aimas ! | | En grands verres déjà pétille Le vin de Bellet (4), si cher aux bons Niçois. Vieux garçons et belles filles Viennent s’abreuver (5), voulant chacun sa part... Cet élixir scintille Meilleur que Jouvence (6) et jamais à l’écart Vous le dégustez, Vous vous pourléchez, De le goûter vous ne serez jamais las ! Vous l’aimez ! |
3e couplet |
Ma Carneval vous douna, Belli fiheta, lou plus ric dei tresor : L’Amour fouol que s’abandouna E dous baià valènt lou sièu pesant d’or ! Proufita n’en lèu, coucouna ! L’elut dau couor vau bèn mai qu’un gran milord ! Que l’amourous Cante, radious, Tout en vous faguènt de baià fouol Au couol. | | Mais Carnaval vous donne, Belles fillettes, le plus riche des trésors : L’Amour fou qui s’abandonne Et doux baisers valant leur pesant d’or ! Profitez en vite, douces ! L’élu du cœur vaut bien mieux qu’un grand milord ! Que l’amoureux Chante, radieux, Tout en vous faisant des baisers fous Dans le cou. |
1. Dans la mythologie grecque, les Hespérides étaient les trois nymphes Æglé, Érythie et Hespéraréthousa. Avec l’aide du dragon Ladon, elles étaient les gardiennes des jardins enchantés des dieux, aux limites occidentales de la Terre, dont les arbres produisaient des célèbres pommes d’or assurant l’immortalité.
2. Train de luxe composé exclusivement de voitures-lits (plus une voiture-restaurant et une voiture-bar), baptisé officiellement « Calais-Méditerranée Express », mis en service pendant l’hiver 1886-1887 par la Compagnie internationale des wagons-lits (CIWL), qui a circulé entre Calais et Vintimille, via Paris, la vallée du Rhône, Marseille et la Côte d’Azur. Pour répondre à la demande pressante d’une clientèle aristocratique du nord de l’Europe, soucieuse de passer l’hiver sur la Côte d’Azur et la Riviera, plusieurs de ces trains de luxe venaient d’être créés, à la suite du premier d’entre eux, le « Calais-Nice-Rome-Express » inauguré le 8 décembre 1883. Après l’interruption due à la première guerre mondiale, le Calais-Méditerranée Express est remis en route le 16 novembre 1920 ; il recevra de nouvelles voitures en acier, inaugurées le 9 décembre 1922, dont la couleur bleu et or lui vaudra dès 1923 son surnom de « Train bleu ». Le krach boursier de Wall Street (« jeudi noir ») en 1929, la grande dépression et la dévaluation de la livre sterling ont grandement réduit le nombre de voyageurs britanniques et américains fortunés se rendant sur la Riviera. En 1936, le nouveau gouvernement du Front populaire instaure les deux semaines de congés payés pour les travailleurs. Des voitures-lits de deuxième et troisième classes sont ajoutées au Train bleu pour transporter la classe moyenne et la classe ouvrière en vacances vers le sud de la France. En 1938, le gouvernement du Front populaire nationalise les sociétés privées de chemin de fer, y compris la Compagnie PLM et la CIWL. Pendant la seconde guerre mondiale, le parc matériel du Train bleu est dispersé. En 1949, la SNCF exploite un train express de nuit sous le nom de Train bleu puis, dès 1950, crée le train de jour Mistral. Après la limitation de son parcours à la ligne Paris-Vintimille dans les années 1960, puis le retrait en 1976 de sa mythique voiture-bar, le Train bleu connaît un déclin lent et continu. En particulier à cause de la concurrence des liaisons aériennes en Caravelle, puis de la mise en service des TGV, qui ont réduit la durée du voyage entre Paris et Nice de 20 heures à seulement 5 heures pour le train et à peine plus d’une heure pour l’avion, marquant la fin de l’ère des luxueux trains de nuit vers la Riviera. Le Train bleu a cessé d’exister sous ce nom en septembre 2003, les dernières voitures-lits ont circulé entre Paris et Vintimille le 9 décembre 2007.
3. Sabateà : courir en traînant les savates (du nissart « sabatié », savetier, cordonnier).
4. Voir également San-Rouman-de-Belet.
5. S’amoura : boire à même le goulot de la bouteille.
6. Peut-être une allusion à la « Jouvence de l’abbé Soury », produit de phytothérapie destiné à soulager les problèmes de circulation sanguine, élaboré au milieu du XVIIIe siècle par l’abbé Gilbert Soury (Celloville, Seine-Maritime, 7 octobre 1732 - Celloville, 12 janvier 1810), initialement nommé « Tisane des deux abbés » en hommage à son maître, l’abbé Delarue, curé de la même paroisse et inventeur de remèdes réputés.
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